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    La marquise de Pompadour, François Boucher, vers 1758

     

    Étiquettes et élégances au temps

    de Madame de Pompadour

    par Henrielle Vanier

    A ne considérer Mme de Pompadour que sous l'aspect de reine de la mode, on écarte fort heureusement tout ce qui put être néfaste dans son rôle.
    Seuls s'imposent alors sa grâce, sa beauté et son humeur inoffensive.
    La voici parée de ces charmants atours que nul ne porta mieux qu'elle, plongeant en des révérences dont elle avait tôt appris la souplesse pour mieux séduire le Roi.

    Moralistes et chroniqueurs, en tout temps, ont exercé leur virtuosité à l'occasion des réjouissances de la Cour.

     

    En 1751 la famille royale célèbre la naissance du duc de Bourgogne: belle occasion de critiquer les uns, de plaindre les autres! "On ne s'aperçoit point de la misère à Paris, tout est d'une grande magnificence en équipages et en habits, surtout les hommes. et ce luxe a pris dans tous les états".

    "Toute la cour fait une grande dépense. On ne sait comment se retourner pour gagner".
    Les ducs de Chartres et de Penthièvre font sertir de diamants les boutonnières de leurs habits; on ne parle que de velours multicolores brodes d'or, de brocarts de grand prix, de point d'Espagne d'or; le velours noir n'est pas admis.

      


    Louise Ebel Pandora Versailles Intime.

      

    Barbier ne faisait, en somme, que se répéter; quelques années plus tôt, lors du premier mariage du Dauphin, il récriminait bien davantage: les seigneurs commandaient chacun trois habits pour les trois jours, et à quel prix!
    Le marquis de Stainville faisait doubler de martre du drap d'argent brodé d'or; le marquis de Mirepoix préférait payer fort cher, en première location, les vêtements qu'il rendrait au tailleur à la fin de chaque journée; le raisonnable et raisonneur duc de Croy n'hésitait pas à déranger son budget pour paraître avec dignité: "toujours il y a quelque occasion d'incommoder les gens de cour". gémit notre chroniqueur.

      



    Il gémira encore lorsque les deuils de la Dauphine et de la Reine de Pologne ruineront les marchands de soieries "déjà chargés des habits de printemps et des taffetas de couleur".
    Voilà les dames de la cour et de la ville," celles du bon air" évidemment, en laine pour trois mois; point de diamants; au bout de six semaines, des" effilés" de lingerie, en fait de garnitures; ensuite, le petit deuil en blanc: comment écouler les stocks et les fantaisies du dernier goût?
    Vers la fin du règne, Diderot reprendra le même thème, après le mariage du duc de Chartres:

    "Il faudra voir avec le temps où s'arrêtera ce délire de luxe, ou s'il trouvera le moyen de se surpasser lui-même. J'avais cru, il y a une quinzaine d'années, lorsqu’on inventa pour les habits d'homme, des étoffes à trois couleurs, que cette mode paraîtrait trop frivole et ne pourrait durer longtemps.
    Je me suis bien trompé.
    On a trouvé depuis le secret de mettre sur le dos d'un homme une palette entière, garnie de toutes les teintes et nuances possibles. Aujourd'hui, on met la même variété dans les broderies d'or et d'argent qu'on mêle de paillons de diverses couleurs: ces habits donnent à nos jeunes gens de la cour un avantage décidé sur les plus belles pouées de Nuremberg.
    "Si j'étais Roi de France, et si j'avais à être assassiné. ce serait avec les aiguilles des faiseurs de paillettes et de paillons."

     

     

    Les bals parés, et celui de 1745 venait en première ligne. dans les préoccupations des courtisans, étaient une occasion de se mettre en valeur.
    On n'y pouvait paraître qu'en tenue de Cérémonie, ce qui rendait la fête" plus magnifique qu'agréable". Les hommes" marqués pour danser" portaient des habits à grands parements, brodés sur toutes les tailles (c'est-à-dire, littéralement, sur toutes les coutures), avec des écharpes.

    Ils devaient être en"cheveux longs avec des allonges, ou en perruques naturelles"; ceux qui ne dansaient pas étaient autorisés à les nouer en deux petites cadenettes, mais point en bourse; cette coiffure simplifiée, alors adoptée par tous les gens d'épée, ne convenait pas au cérémonial.

    Les dames présentées n'étaient admises à la Cour qu'en"grand habit", le buste emprisonné par le"grand corps fermé" en forme de cône, rigoureusement baleiné, recouvert de broderies, et souvent cousu de pierreries; les épaulettes réglables, fixées à l'horizontale pour élargir le décolleté, meurtrissaient les bras, recouverts de l'épaule au coude par trois ou quatre rangs de dentelle.

    Sur l'énorme panier,"artistement couvert de fleurs, de perles, d'argent, d'or, de paillons de couleurs et de pierreries, s'attachait le"bas de robe", qui était en réalité une queue assez étroite, mais d 'une longueur variant avec le rang: depuis 9 aunes pour la Reine jusqu'à 3 aunes pour les duchesses, soit de10,5 m à 3,80 m environ.

    Sur la gorge découverte, 7 ou 8 rangs de gros diamants, que l'on empruntait pour l'occasion, ou qu'on louait fort cher à un joaillier; de lourdes girandoles aux oreilles, des pierreries dans la chevelure; et les belles danseuses, perchées sur les hauts talons de leurs souliers pointus enduraient le martyre en souriant à la ronde.

      

    Celles qui n'étaient plus jeunes pouvaient, à la rigueur, masquer par une mantille un" corps" ouvert moins suffocant.

      



    Dure contrainte de la toilette

      

    Une femme qui allait paraître à la cour pour la première fois devait, tout d'abord, faire examiner par le généalogiste officiel ses preuves de noblesse; elle prenait ensuite l'heure du Roi et de la Reine pour être introduite par une dame déjà présentée; elle avait, auparavant, répété ses révérences avec le maître à danser, et s'était exercé à endurer. pendant ces évolutions, le redoutable"grand corps".
    L'habit de présentation devait être noir. orné de dentelle blanche. et tout recouvert. Pardevant de pompons et de passementeries d'or.

    Puis le lendemain. pour la tournée des visites obligatoires.
    "Tout ce qui était noir se changeait en or et en soieries multicolores". La présentation en grand habit donnait le droit de monter dans les carrosses du Roi et de la Reine., et de souper dans les petits appartements.
    La Reine pouvait aussi accueillir des présentations secondaires, ou "subalternes". mais qui se passaient sans éclat. à sa toilette et en " robe de chambre".

     

     

     

      

    La présentation des hommes autorisait à chasser avec le Roi. à être reçu dans ses carrosses. à monter ses chevaux et à souper dans les petits appartements: "toute autre présentation ne constituait point homme de cour", dira sentencieusement Mme de Genis.
    Pour paraître à la messe du Roi. et lorsque la Reine était en représentation, les dames devaient encore revêtir le grand habit.
    Marie Leczinska en sera réduite. à Fontainebleau. à"écouter la musique de sa chambre, si elle était dans la pièce. il faudrait être en grand habit".

    Les filles de Louis XV qui menaient dans leurs appartements une vie assez casanière, passaient précipitamment. à l'heure du débotté. "un énorme panier recouvert d'une jupe chamarrée d'or et de broderie; elles attachaient autour de leur taille une longue queue.
    et cachaient le négligé du reste de leur habillement par un grand mantelet de taffetas noir. qui les enveloppait jusque sous le menton" En moins d'un quart d'heure. la corvée terminée, Mesdames rentraient chez elles, dénouaient les cordons de leur jupe et de leur queue. et reprenaient leur tapisserie.

     



     

      

    Lorsque le Roi regrettait de ne pas les voir dans l'intimité, elles faisait revenir chez lui après le souper" sans paniers".
    La pieuse Reine n'a jamais prétendu tenir un rôle de coquette: que de belles toilettes, pourtant, lui préparait sa dame d'atours!
    Les échantillons qui en ont été conservés, avec leurs rubriques, permettent de les évoquer:
    " satin vert canard à fleurs d'or; petit jaune à mille fleurs; satin nouveau fond franchipane à fleurs d'argent; moire nouvelle d'Angleterre, Velours ciselé de Florence; taffetas peint; gros de Tours blanc garny de paquet de celery renonès avec du ruban". On en faisait, non seulement de grands habits de cérémonie, mais aussi de ces innombrables robes de toilette, robes à peigner, robes de chambre et robes abattues, qui convenaient aux circonstances et à l'emploi du temps, puisqu'il fallait changer de tenue au moins trois fois par jour, et souvent davantage.

     

     


     

    Après avoir figuré à la Cour, en cérémonie, quelle joie pour une jolie femme de s'esquiver vers quelque fête privée, comme celle pour laquelle Choffard a gravé, dans un encadrement chantourné, ce libellé:" Bal pour lundi à 6 heures, les dames sans panier."

    Dès la fin du règne de Louis XIV, on avait réussi à obtenir quelques dérogations aux rigueurs de l'étiquette: les veilles de départs, les dames étaient autorisées à paraître devant le Roi sans être en grand habit; et l'on partait souvent!

    A la campagne, elles' ne faisaient que deux toilettes: pour le matin, un"négligé"; puis, au retour de la promenade," elles se paraierit avec une grande magnificence", mais en robe ouverte, et sans les pénibles contraintes de la tenue de cérémonie.

     

    Château de Madame de Pompadour, Chevilly-Larue

    Chateau de Chevilly Larue de Madame de Pompadour

     

    A Marly, elles étaient invitées à déjeuner, à midi, dans le grand salon, avec le Roi et la famille royale; comme on aimait l'été, retourner de nuit dans les jardins, en grande parure.
    Mme de Pompadour a préparé, dit-on, pour le voyage de mai l75l, une robe garnie de dentelles d’Angleterre, coûtant plus de 22.500 livres.

     

     

    Elle sut triompher de toutes

     

    Les femmes abusaient du rouge en ce temps là, et il devait être plus rouge à la cour qu'à la ville, au point que" l'on avait peine à voir leurs yeux". "Ce rouge, qui semble vouloir être naturel, est une vraie ridiculité", reproche une mère à sa fille.

    Mais il était de mauvais goût d'en mettre le matin, excepté en habit de cour. La jeune Infante qui venait épouser le Dauphin, reçue en France par ces dames trop fardées, envoya demander au Roi"la permission de mettre du rouge", afin d'être au diapason pour les fêtes des noces.
    Quant aux mouches, c'était le point final du maquillage, il ne pouvait être question de les oublier.

    Que de fastidieuses réglementations pour se plier aux usages! On quittait les fleurs avant l'age de 30 ou de 35 ans; on prenait une coiffe noire à 50 ans.
     

    Quand on entrait en dévotion, ostensiblement" on quittait le rouge". Le moindre détail de ces toilettes savamment orchestrées était tout un programme.
    Les rois donnajent des bals masqués dans les grandes occasions, afin que les personnes qui n'étaient pas présentées puissent y venir. On y allait en domino, ainsi qu'aux bals ordinaires de la Cour, aux bals offerts par la Municipalité de Paris, à l'Hôtel de Ville, bals masqués de l'Opéra.

    Les dominos étaient taillés"comme des robes de ville, avec des plis par derrière, de très longues manches, de petites queues" et un capuchon; ils se portaient avec de petits paniers; on se divertissait d'autant mieux que le port du masque autorisait les mystifications et les galanteries.

    Lors des fêtes de 1747, pour le second mariage du Dauphin, il y eut"Appartement" à 6 heures, c'est-à-dire assemblée générale de toute la famille royale avec les princes du sang et toute la Cour: Après le souper, "la Reine, en grand habit, se déshabilla pour aller au bal dans son petit appartement", où la Dauphine et Mesdames se rendaient"en habit de masque".

     

     


    Ex-libris aux armes de la marquise de Pompadour
    Banque d'Image du centre de recherche du Château de Versailles, INV.GRAV 7037

      

      

    Vers minuit et demi, raconte le duc de Luynes,"la Reine, masquée. alla jusqu'au Salon d'Hercule pour voir danser la Dauphine, et rencontra la troupe du Roi, masquée et en dominos tous semblables; Mme. de Pompadour y était à visage découvert".

    Ainsi, dans le réseau compliqué des subtilités de l'étiquette, s'était glissée, puis triomphalement installée, cette ravissante personne que le Président Hénault, dès l742, signalait à Mme du Deffand, pour l'avoir admirée à souper.

     

    chez Pont-de-Veyle: "Je trouvai là une des plus jolies femmes que j'ai jamais vue, c'est Madame d'Etioles; elle sait la musique parfaitement, chante avec toute la gaieté et le goût possibles, sait cent chansons, jouie la comédie à Etioles."
    Cette beauté de vingt ans sut se faire remarquer, en forêt de Sénart, sur le passage des chasses royales. Bientôt la mort brutale de la duchesse de Châteauroux suggéra les commentaires que traduit "l'Espion Chinois": "Toutes les jolies femmes se mirent en campagne. n y eut de quoi travailler pour tout le monde: les marchandes de modes, les coiffeurs, les agrémanistes passèrent les nuits. " On ne vendit jamais tant d'étoffes, de rubans, de dentelles, de pompons. On eut dit que toutes les femmes étaient veuves, et qu'elles se préaraient à passer en secondes noces. " On prit des bains et on se parfuma à tout événement".

     

     

    Notons au passage la place occupée, dans l’élégance féminine, par ces passementeries, fabrication des agrémanistes parisiens: associant, avec une inépuisable fantaisie, des soies multicolores, d'étroits rubans. la chenille, la blonde; déroulant des franges à houppettes, qui répondaient au nom mystérieux de sourcil.

     

     

     

      

      

    ou" soucil d'hanneton et prétendaient imiter les cornes des hannetons, les agréments serpentent au bord des corsages, des manches en pagode et des pans entrouverts du "manteau" soulignent les volants et les falbalas, en s'inspirant du dessin et des couleurs de l'étoffe; reproduisent en miniature les guirlandes et les bouquets qui y sont tissés; et le triomphant bouquet de corsage, insér* à l'angle du décolleté, les ornements de coiffure, les aigrettes de fleurs n~ sont souvent qu'un trompe-l’oeil réalisé par les mêmes artisans.

    Il, ne fut pas question d'aïeux

    Dès février 1745, le duc de Luynes, confident de la Reine, note: "Tous les bals en masque ont donné l'occasion de parler des nouvelles amours du Roi", mais il présume que ce n'est" qu'une galanterie, et non pas une maîtresse".

    En avril, on la remarque aux spectacles de la Cour," dans une loge fort en vue de celle du Roi, et par conséquent de la Reine, fort bien mise et fort jolie".

    Le Roi soupe avec elle, en particulier,"dans ses cabinets, ou en quelque autre endroit qu'on ne sait point". Un petit groupe de courtisans de la plus haute volée se fonne autour d'elle: "ce sera dans peu à qui y soupera, des princesses et dames de la Cour". Après l'avoir installée à Versailles, le Roi achète pour elle, au prince de Conti, le marquisat de Pompadour; il faut bien que le duc de Luynes en convienne," elle sera présentée".

    Elle le fut, en effet, dès le mois de septembre; introduite par la Princesse de Conti, en présence de la foule impitoyable des courtisans.

    La pauvre Reine en avait vu bien d'autres; sa vertu réelle et sa sincère piété lui conféraient une dignité qui imposait le respect. "On pensait que la Reine lui parlerait de son habit, mais elle crut devoir, par cette raison même, lui parler d'autre chose".

    Et ce fut le Dauphin qui lui parla de son habit. Dès la semaine suivante, elle est ouvertement de toutes les parties: elle dîne, à Choisy; avec toutes les dames, à la table de la Reine; elle figure, en tenue de chasse, lors de la visite de Stanislas Leczinski.

     

    " Elle est polie, elle a un fort bon maintien, elle n'est point méchante, ne dit du mal de personne, et ne souffre pas même que l'on en dise chez elle" En octobre, à Fontainebleau, elle ne sort de son appartement que pour aller chez la Reine, devant qui elle multiplie les égards et les témoignages de respect; elle lui envoie des bouquets, Elle engage le Roi à la bien traiter. Mesdames, et même la Dauphine, affectent d'être avec elle en rapports corrects, malgré leur attitude distante et certains silences pénibles, surtout de la part du Dauphin.

     



     

    Les" Choisy" se succèdent pendant la saison d'automne; les dames y sont en"robes" abattues" et, à Dampierre, en robes de chambre. A Marly, le cercle de la Reine et celui de la favorite, avec le Roi, se rencontrent dans le parc;" tout se passe de bonne grâce". Au retour de la campagne de 1746, le Duc de Croy se fait présenter à la Marquise; la trouve charmante,"de figure et de caractère".
    "Elle passe avec aisance sur le corps des premières duchesses, en leur faisant politesse, au grand couvert, pour s'y asseoir".

    Les courtisans les plus favorisés, pour être admis d'office dans les réunions des petits châteaux, arboraient un uniforme vert galonné d'or, qui leur permettait de suivre le Roi dans ses déplacements, sans invitation particulière. Pour l'inauguration de Bellevue, la Marquise imagine de gratifier ses invités d'un" Habit d'ordonnance" en fin drap pourpre, largement borde d'or en bordure et en boutonnières, selon un dessin de son invention, avec "une veste de satin gris-blanc, travaillé en pourpre d'un dessin chenillé, et d'un grand bordé d'or mat, large de quatre doigts".

    Pour les dames, les robes devaient être de ce même satin gris-blanc, tout unies et sans or. Malheureusement, Mme de Pompadour n'offrait que les tissus, et la broderie, fort coûteuse, restait à la charge des heureux élus, ainsi que les habits des valets de chambre, en drap vert, à bordure et boutonnières d'or!

     

     

     

    Robes de bain et négligés

     

      

    "Madame de Pompadour altéra un peu le ton de la cour, proclame Mme de Genlis, mais ne changea. rien aux étiquettes."

    Pour esquiver les difficultés de protocole, elle recevait à sa toilette,"en peignoir et nu-tête" dans son arrière-cabinet de laque rouge. On se pressait à sa porte, il y avait du monde jusqu’au bas, de son petit escalier. Le comte d'Argenson ose, même écrire:
    " la toilette de cette dame est une espèce de grande Cérémonie, on la compare au fameux déculotté du Cardinal de Fleury .. Les soirs, tous les grands y accourent pour se montrer."

     

    On y rencontre, entre autres, la Maréchale de Mirepolx, cette altière Lorraine, Dame du Palais de la Reine, le Maréchal de Saxe que la favorite appelle"mon maréchal", le duc de Richelieu pour qui elle improvise, après la prise de Minorque, un noeud d'épée appelé"à la Mahon".

     

     

    Louise Ebel Pandora Versailles Intime.

      

      

    Tout a été dit sur la toilette des femmes au XVIIIe siècle, sur leurs coiffeurs: ce Dagé qui"accommoda" successivement Mme de Châteauroux, la Dauphine et Mme de Pompadour; ce Legros qui publiera en 1765 un livre d'estampes:"de l’Art de la coiffure des Dames", au moment ou le"tapé" s'élève en hauteur, rehaussé de crêpons et de coussinets de crin. Mme de Genlis précise ce qu'illustrent toutes les estampes: "Les dames s'habillaient, changeaient de chemise, se laçaient devant les hommes"; elle continue, imperturbable: "On recevait des hommes lorsqu’on était dans son lit, on n’en recevait jamais lorsque on était dans son bain".

     

     

    On se baignait, du reste, en longue chemise de flanelle ou de tricot, boutonnée du haut en bas, les bouts de manches, ainsi que le collet, étaient doubles de linge. Le trousseau de Mme de Pompadour, inventorié après sa mort, remplissait 9 malles, dont 3 de lingerie, dentelles et garnitures. Il s’y trouve erl quantité ces peignoirs et"manteaux de lit", en mousseline brodée, en linon Qroché ou en point d’Angleterre, ces derniers composant de véritables ensembles: le grand fichu, la coiffe. la taie d'oreiller et les draps, assortis au manteau lui même.

    "Recevez, charmante Adrienne. recevez ce manteau de lit", écrivait Voltaire à Mlle Lecouvreur, bien des années auparavant: la favorite reçut évidemment nombre de semblables cadeaux. Son livre de comptes, très régulièrement tenu, précise qu'elle n’a dépense pour sa garde-robe."en 19 ans de règne",que 350.235 livres, tout compris.

     

     

    Moulin à café en or ayant appartenu à Mme de Pompadour
    Oeuvre de Jean Ducrollay (vers 1708 - après 1776)
    Conservé au Musée du Louvre, Objets d'Arts, INV OA 11950, acquis par dation en 2000.

     

    C’était en 1764 une grosse somme, et les mémorialistes ne tarissent pas sur ses excessives dépenses. Mais aussi,. quel choix de précieuses dentelles pour ses devants de corps, ses tours de corset, ses tours de gorge, ses manchettes à 2 et à 3 rangs, ses coiffes, coiffures,"barbes, respectueuses et port-mahon"!

    Valenciennes, Angleterre, Malines et point d’Argentan se fixaient dans les boucles de la chevelure par les "plis pour bec de bonnet", en brillants, rubis, diamants jaunes et saphirs.

    Parmi les déshabillés, on lui attribue le lancement de ces négligés appelés à la Pompadour, "dont les formes sont telles qu’ils ressemblent aux vestes à la turque, pressent le col, et sont boutonnés au-dessous du poignet; ils sont adaptes à l'élévation de la gorge et collent juste sur les hanches, rendant sensibles toutes, les beautés de la taille. en paraissant vouloir les cacher". C'est ainsi que Van Loo la peindra en Sultane prenant le café, et l'on retrouve dans ces souples vêtements d'intérieur, d'inspiration orientale, le souvenir des costumes de théâtre et de son goût pour la scène.

    Elle s'était fait applaudir en"habit à l'asiatique" ou en "doliman de satin cerise, garni d'hermine découpée, avec jupe de satin blanc peinte en, broderie d'or".

    Quand elle paraissait dans le répertoire classique, c'était une tenue plus encombrante; elle portait dans Acis et Galatée une "grande jupe de taffetas blanc peinte en roseaux, coquillages et jets d'eau, avec broderie frisée d'argent bordée d'un réseau chenillé vert; un corset rose tendre, avec une grande draperie de gaze d'eau argent et vert à petites raies, le tout. orné de glands et de barrières de perles".

    Elle ne dédaignait pas non plus le travesti masculin, et jouait Colin "habillée en homme, mais comme les dames le sont quand elles montent à cheval: c'est un habillement très décent".

     

    Château de Madame de Pompadour, Chevilly-Larue

     

    Tombée au rang de dame de compagnie

    Nos brillantes amazones montaient en longue et ample jupe et devaient être munies d'un large choix de tenues de chasse, selon qu'il s'agissait de galoper en foret, ou de suivre dans les carrosses du Roi.
    C'étaient tantôt de véritables justaucorps de coupe masculine: aux larges poignets galonnés, ouvrant sur le gilet qui s'appelait alors la veste; tantôt d'amples robes à plis, fermant devant sous des ruches de passementerie d’or, qui soulignent aussi les longues manches avec une cravate de lingerie, et le petit tricorne bordé de fourrure, crânement posé sur une perruque d'homme nouée"à la brigaudière"; c'est ainsi que Nattier représente Mme Infante, fille aînée de Louis XV, dont le voyage en France, en 1748, provoque quelques difficultés, à cause des réjouissances familiales auxquelles participait la favorite.
     

     

     

     

      

    Mme de Pompadour, à la fin de sa vie, avait dans ses bagages un habit de drap vert brodé d'or, une redingote de pou de soie avec"veste" assortie, brodée en or également, ainsi qu'un autre habit de laine tricotée, complété par la veste, la jupe et la culotte de même.
     

      

    Mesdames aimaient toutes courre le cerf à cheval, mais surtout Mme Louise qui devint carmélite.
    Après ces randonnées, le Roi recevait ses filles en tenue de chasse dans ses petits appartements; pendant le deuil de la Dauphine, elles chassaient habillées de noir ainsi que leurs dames, et les hommes en justaucorps gris.

     

     


    Louise Ebel Pandora Versailles Intime.
     

      

      

    En hiver, les parties de traîneau sur le Grand Canal donnaient prétexte à étaler les riches fourrures, le manteau d'hermine, les garnitures de martre zibeline et les manchons en baril.
    Le velours fourré et ourlé de luxueuses pelleteries laissées à la silhouette toute sa sveltesse; c'est la favorite, blottie dans son traîneau, que Boucher a prise pour modèle en évoquant les plaisirs de l'hiver.

    Mme de Pompadour partageait encore, bien entendu, les deuils de la famille royale; une de ses malles était consacrée aux toilettes imposées en ces circonstances: grands habits, robes de chambre, ou casaquins avec leur jupe, en ras de Saint-Cyr, en taffetas, velours et gaze; noirs, blancs ou gris; en satin moucheté, en taffetas rayé. garnis de plumes.

    Pendant la deuxième période du deuil, on avait droit aux lingeries unies et garnies d'effilés.
    Le petit deuil permettait, en noir et blanc, les perses, les indiennes, les pékins, toutes ces gracieuses fantaisies à ramages de caractère exotique, peintes ou imprimées, d'autant plus recherchées que la fabrication et la vente en resta interdite jusqu en 1759; ce qui stimulait les importations clandestines, par les vaisseaux de la Compagnie des Indes.

     

     



     

      

    Le deuil termine, Mme de Pompadour reprenait avec joie ses négligés de" toile peinte" en toutes couleurs; quantité de pièces entières et de métrages pour robes figurent dans son inventaire.

    En dépit de sa mauvaise santé, elle soutenait le rythme épuisant de la vie de cour; tantôt on la trouvait maigrie,"la mine défaite, coiffée de nuit à la chapelle"; puis engraissée et plus belle que jamais.

     

      

    Elle obtint en 1752 le tabouret et les honneurs de duchesse; on vit son écuyer, le Chevalier d'Henin, de la Maison de Chimay, "portant sur le bras son mantelet en suivant sa chaise à pied, prêt à poser le manteau sur ses épaules dès qu'elle mettrait pied à terre".
    Ensuite elle donna dans la dévotion, tint des conférences avec le Père de Sacy, fit des lectures de piété, priant ostensiblement sous ses coiffes baissées, n'allant plus au théâtre, ne recevant plus à sa toilette, mais à son métier. Le bruit courut"qu'elle allait quitter le rouge"...
    Mais non, le sérieux duc de Croy l'écrit sans rire, "ce n'était qu'un quart de conversion".

     

      

    N'étant plus pour le souverain qu'une amie et une" dame de compagnie", elle pouvait sans indécence et réimposée à la Reine comme Dame du Palais. La duchesse de Luynes l’introduisit en cette charge au milieu de l'étonnement des courtisans: "Entrant en semaine de service, elle y a paru à souper, au grand couvert, parée comme un jour de fête, et elle a fait son service avec un air tranquille, comme si elle n'avait jamais fait autre chose."

     


     

    Parmi ses amis les plus fidèles, le duc de Choiseul et sa charmante femme tiendront chez elle, jusqu'à ses derniers jours, de ces conversations intimes et"dégantées" dont le Roi aimait le naturel.
    Mais ses forces déclinaient, elle souffrait de quintes de toux, de suffocations. Pendant un séjour à Choisy, en 1764, une rechute plus grave se déclara. Ramenée à Versailles, elle se sentit perdue, et se prépara à la mort avec beaucoup de fermeté et de religion; elle n'avait que 42 ans.
     

      

    Bientôt la mort prématurée du Dauphin, de la Dauphine, la disparition de la Reine, multiplièrent les deuils de la Cour. Mesdames restaient à l'écart. Mme du Barry n'eut ni le temps ni les qualités nécessaires pour s'imposer. Le sceptre de l'élégance, maintenu par Mme de Pompadour pendant "19 ans de règne", sera repris par Marie-Antoinette; et la Mode, sous son impulsion personne1le, évolua vers un style très différent.

    Sources : HENRIELLE VANNIER

    http://www.madamedepompadour.com

      

      

     

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