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    Au soir du cinq octobre, Marie-Antoinette ne sait plus quoi penser.

     

    Elle a peur... et elle a raison.

     

    C'est sa dernière nuit à Versailles.

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    Madame de Tourzel et les dames de service cette nuit là avaient reçu pour ordre de mener les enfants royaux chez leur mère à la moindre alerte.

     

    Marie-Antoinette ne semble pas encore comprendre que son mari est aimé, que c'est à elle qu'on en veut.

     

    Sur le coup de onze heures, elle annule son ordre et commande d'emmener les Enfants de France chez le roi, où ils seront en sécurité.

     

    Ils dorment, et tout le monde espère que les malheureux évènements du 5 seront bel et bien finis.

     

    La Reine, à qui l'on a conseillé de dormir chez son mari, préfère attirer la foule vers elle. Les rumeurs vont et viennent, se contredisent.

     

    Enfin Marie-Antoinette, sur les deux heures du matin, va se coucher pensant qu'il ne se passera rien, et conseille à tout le monde d'en faire autant.

     

     

    Vers six heures, les attaques recommencent. "Point de quartier! Tue! Tue" hurle-t-on.

     

    La masse populaire tranche la gorge de tous ceux qui sont sur son passage.

     

    Ce sont d'abord les sentinelles de l'appartement de Mesdames, c'est ceux du grand escalier que les suisses et autres gentilshommes défendent corps et âme.

     

    La foule avide de sang - et de pain- a tout envahi, cours intérieures, jardins, et avance toujours plus loin jusqu'aux appartements de la Reine.

    "Il nous faut le coeur de la Reine! Prenons ses entrailles pour en faire des cocardes!"

     

    Plusieurs gentilshommes, blessés, ont heureusement le temps de crier

    "Sauvez la Reine! Sauvez-la!"

     

    Mme Thibaut, première femme de chambre de Marie-Antoinette, ne s'était pas couchée.

     

    Elle réveille la souveraine et lui fait passer une robe.

     

    Elles partent par le petit passage secret situé à la droite du lit.

     

    Peu de temps après, la populace défonce les portes et martèle de piques le matelas vide.

     

    S'ils découvrent les passages qui mènent aux petits appartements, c'en est fait.

     

    Heureusement, ce n'est pas le cas.

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    La Reine arrive donc chez le Roi... et n'y trouve pas ses enfants. M. de Sainte-Aulaire a couru vers les appartements du jeune Louis-Charles où veille Madame de Tourzel.

     

    Tous trois reviennent sans incident chez Louis XVI.

     

    On se soucie moins de Madame Royale, car il est certain que ce n'est pas chez elle qu'ira ce peuple en déroute.

     

    La reine n'est pas de cet avis, et prend l'un des escaliers intérieurs pour descendre chez sa fille et la jeune Ernestine.

     

    N'oublions pas que leurs appartements donnent sur la cour de marbre!

     

    Elle y trouve les filles de Mme de Tourzel veillant sur ces enfants de onze et dix ans.

     

    Tout le monde chez le Roi, dont l'appartement n'est pas encore forcé, les gardes se relayent.

     

    Courageusement, ils attendent la mort, et beaucoup périront lors de ces attaques.

     

    Leurs fils, leurs filles seront condamnés au Tribunal Révolutionnaire.

     

    Mais tout cela prend fin: la Garde Nationale de Paris charge le peuple, qui est reflué vers la cour de Marbre.

     

    Que se serait-il passé si la charge avait eu lieu la demi-heure précédente, Madame Royale dans ses appartements?

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    La famille royale réunie, on se concerte.

     

    Debout sur une chaise, Louis-Charles joue avec les longs cheveux défaits de sa soeur.

     

    Il a faim.

     

    Elle sait qu'il ne faut rien demander.

     

    A côté d'eux, la soeur d'adoption de Madame Royale, dont le père officiel court en ce moment dans Versailles pour défendre la Reine.

     

    C'est Ernestine Lambriquet.

     

    Dans Versailles, les rumeurs courent: on assure, nous dit un député du Tiers, que la Reine est partie dans une voiture grise, prenant la route de Saint-Cyr.

     

    Elle est pourtant toujours au château; la dame dans la voiture était Mme de Saint-Priest, qui devait accoucher et dont le mari était aux côtés du Roi.

     

    Les gardes meurent les uns après les autres.

     

    Ecoeuré, Louis XVI ouvre les portes-fenêtres de son appartement et se montre au Balcon donnant sur la Cour de marbre.

     

    Ses défenseurs, restés avec lui, jettent leur bandoulière à terre et crient

    "Vive la Nation!"

     

    Le peuple se calme et invite la garde à descendre dans la cour de marbre pour faire la paix.

     

    Pendant ce temps, toute la Famille Royale, les tantes du Roi, Madame Élisabeth, et les habitants du château se retrouvent chez le Roi.

     

    Il discute avec la Fayette: faut-il quitter Versailles pour s'installer à Paris?

     

    Après quelque temps de débat, le Roi se présente à nouveau au balcon et annonce sa décision au peuple. "L'ivresse de cette multitude fut à son comble" nous dit Mme de Tourzel.

     

     

    Mais cela ne suffit pas; si les hommes sont contents, les poissardes et les dames de la Halle sont toujours là.

     

    De la cour de Marbre, elles demandent à voir la Reine.

     

    Marie-Antoinette s'exécute, tenant par la main le Dauphin et Madame Royale.

     

    On la regarde avec fureur.

     

    "Faites rentrer les enfants!"

     

    C'est vraiment à la Reine qu'on en veut. Si Louis XVI est admiré par le peuple et conserve sa réputation méritée d'homme bon et généreux, la Reine est haïe.

     

    Une députation est nommée pour accompagner la famille royale à Paris.

     

    On part donc entre une heure et demie et deux heures.

     

    "Le Roi, nous dit Adrien Duquesnoy, était dans une voiture, dans le fond à droite, la Reine à gauche, Monsieur le Dauphin sur ses genoux, Madame entre le Roi et la Reine. Monsieur et Madame (NDW: de Provence) au milieu, Madame Victoire et Madame Élisabeth sur le devant."

     

    Et le député de conclure

    "Qu'on pense à ce très étonnant spectacle et qu'on dise si l'histoire en offre un pareil!"

     

    Madame de Tourzel, si elle confirme que le Roi et la Reine étaient avec leur fille, précise

    "J'étais sur le devant, tenant sur mes genoux M. le Dauphin, et Madame (de Provence) était à côté de ce prince.Monsieur et Madame Elisabeth étaient aux portières."

     

    Entourée par la Fayette et d'Estaing, la voiture, après six heures de pure folie, arrive à Paris.

     

    Précédée par la populace, elle ne voit pas les deux piques sur lesquelles sont plantées les têtes de Des Huttes et De Varicourt.

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    On arrive à Passy.

     

    Au balcon d'un hôtel richement meublé, quatre jeunes gens et leur gouvernante regardent la scène, mi amusés, mi dépités.

     

    Ce sont Mme de Genlis, le jeune Louis-Philippe d'Orléans, ses frères Antoine et Alphonse et leur soeur Adélaïde, âgés de 16, 14, 10 et 12 ans.

     

    Leur père, le futur Philippe-Egalité, a demandé qu'on leur fasse assister à la scène.

     

    Le voyage n'est qu'une série d'insultes.

     

    A la barrière de Chaillot, Jean-Sylvain Bailly, le maire de Paris, présente les clefs de la ville à Louis XVI.

    "Quel beau jour, Sire, que celui où les parisiens vont posséder dans leur ville Votre Majesté et sa famille!" déclare-t-il.

     

    Notons bien ce mot de posséder.

     

    C'est ce sentiment là qui insupporte le Roi, et qui lui fera choisir, dans un an et demi, de quitter Paris pour Montmédy.

     

    On compte partir de suite aux Tuileries, mais Bailly s'enflamme et supplie le Roi de se rendre à l'Hôtel de Ville.

     

    La foule est si dense qu'on descend place de Grève et marche jusqu'à la Mairie.

     

    On crie "Vive la Famille Royale"... puis tout en détail, le Roi, la Reine, le Dauphin, Madame Royale, les Provence... tout le monde y passe.

     

    Bailly présente au Roi un nouveau discours.

     

    Tout le monde est épuisé.

     

    La séance se termine par un "Vive le Roi"

     

    A tel point qu'on pourrait croire que c'est une fausse alerte, et que tout sera comme avant.

     

    Grave erreur.


    La Famille Royale est conduite aux Tuileries.


    Le château est désert.

     

    Volets et portes n'avaient pas été fermés depuis Louis XIV.

     

    L'horloge est arrêtée.

     

    Versailles, symbole de la royauté, est devenue une ville morte.

      

    SOURCES

    superbe blog

    http://decroyhavre.over-blog.com/article-27920897.html

      

     
     
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